20 décembre 2015

Voyage au Portugal

Mon voyage au Portugal à l’automne 2015

J’étais allée au Portugal en 1970, plus spécifiquement en Algarve.  Nous devions y séjourner une semaine.  Après deux nuits, nous sommes retournés en Espagne.  La perception que j’avais ressentie était d’une telle tristesse que je ne voulais pas rester plus longtemps.  La population me semblait déprimée, renfermée et surtout inquiète.  Je ne comprenais pas le phénomène n’ayant aucune connaissance de l’histoire de ce pays et en particulier, de la dictature existante, celle de Salazar.  Ce pays ne m’était pas apparu sympathique c’est le moins que je puisse dire.

À cause d’amis portugais, je me suis intéressée graduellement à ce pays.  De plus, la performance récente du pays sur le plan économique a suscité chez moi une certaine curiosité.  Aussi en septembre 2015 j’ai décidé d’aller y voir de plus près pour mieux comprendre et me faire une idée sur l’ambition de ce pays et sa capacité à relever les nombreux défis qui se présentent à lui.

On a tous plus ou moins appris l’importance de ce pays dans l’histoire du XV- XVI ième siècle.  On sait que le Portugal a été une grande puissance. Qu’il a donné naissance à de grands explorateurs comme Magellan et Vasco de Gama.  On a aussi appris qu’ils ont ouvert des territoires aussi éloignés que l’Inde, l’Amérique du Sud, et même l’Afrique.  On sait aussi que dans le cadre de ces grandes découvertes, il a été un des premiers pays à faire le commerce des esclaves sinon le premier.  Mais aujourd’hui, qu’en est-il?

Ce petit pays compte 10 millions d’habitants sur une bande de terre de 600 000 km carré et 800 km de long.  Et pourtant Il y a plus de 275 millions de personnes qui parlent portugais dans le monde.  C’est la langue officielle de 9 pays membres de l’ONU:  Brésil, Mozambique, Angola, Portugal, Timor oriental, Guinée Bissau, Guinée équatoriale, Macao, Cap Vert, Sao-Tomé-et-Principe.  C’est dire combien les découvertes du Portugal ont eu une influence dans ses belles années de prospérité.

À notre arrivée à Lisbonne, il faisait un temps splendide. Le vol direct de six heures depuis Montréal m’a semblé est assez court et l’aéroport de Lisbonne plutôt efficace.  Un taxi nous conduit à notre hôtel dans le beau quartier de l’avenue de la liberté.  Le BessaHotel Liberdade dans le quartier de Rossio est une belle surprise.  La modernité de cet hôtel contraste vraiment avec les édifices des environs d’architecture plus ancienne.  L’avenida da Liberdade est pour Lisbonne l’équivalent des Champs Elysées pour Paris.  On y retrouve les belles boutiques élégantes et très chères.  La rue est séparée par une promenade bordée d’arbres au pied desquels logent des petits cafés.  Un vrai dépaysement.

Lisbonne aurait été fondée par Ulysse d’où son nom d’Olissipo en grec ancien et celui de ses habitants, les Olissiponenses.  D’ailleurs il y a plusieurs hôtels de la ville qui affiche le mot Olissipo.  Lisbonne serait l’une des plus vieilles villes d’Europe après Athènes, mais avant Rome.  Sa situation géographique au bord du fleuve Tage lui vaut l’attention commerciale dès ses débuts.  Elle est devenue la capitale du Portugal en 1255.  Environ un dixième de la population portugaise y habite.  Elle est construite dans une sorte d’enclave encerclée par sept collines.  Lisbonne serait la plus petite des métropoles européennes, mais elle en est néanmoins l’une des plus captivantes.

L’année 1755 marquera Lisbonne à tout jamais alors qu’un terrible tremblement de terre détruit presqu’entièrement la ville.  Sa reconstruction est l’oeuvre du marquis de Pombal, secrétaire d’État du roi de l’époque (José I) qui modernisera la ville à moitié détruite.  Des statues du marquis de Pombal se retrouvent un peu partout dans la ville et témoignent de l’importance de son oeuvre, comme de la reconnaissance de la population.  Malgré certaines répressions il ne fait aucun doute que Pombal a réformé profondément le Pays avec une grande efficacité.

En descendant vers le bord du Tage, les noms der rues portent souvent le nom des corporations des artisans qui y oeuvraient.  On y note la rue des couteliers, la rue du fer et la rue de l’argent pour ne nommer que celles-là.  Les vielles rues de Lisbonne sont pavées de marbre blanc et de pierre de basalte noir ce qui donne un bel effet damier. La rue de l’or nous conduit jusqu’à la superbe place du commerce au bord du Tage.  Juste à côté la rue Augusta finit au pied de l’arc de triomphe d’Auguste, magnifique structure de style baroque.   Ce quartier commerçant de Baixa-Chiado est vibrant d’activité tous les jours, même si le quartier à la mode actuellement est plutôt le Barrio Alto un peu plus haut sur la colline.

La Place du commerce  est la  plus belle place de Lisbonne.  C’était autrefois l’esplanade du palais royal disparu évidemment.  Cette place rappelle les magnifiques places européennes du XVIIe et XVIIIe siècle.  Elle est bordée d’édifices assez classiques et d’arcades qui en font un endroit de choix pour observer la ville et le fleuve Tage.  Les foires se tenaient sur cette place et le chantier naval était tout près. Ce superbe ensemble d’édifices  reconstruits après le tremblement de terre de 1755 abrite aujourd’hui différents ministères ainsi que la Bourse de Lisbonne. On y trouve une statue équestre en bronze d’une seule coulée, du roi Joseph 1er.  Etonnamment un éléphant se trouve au pied du monument.  En effet le Roi du Portugal aurait offert un éléphant à l’Autriche lors d’une occasion importante, sans doute un mariage royal.  Cette histoire semble avoir inspiré une oeuvre du portugais Nobel de littérature, l’écrivain José Saramago, intitulée « Le voyage de l’éléphant ».  Petit fait intéressant concernant cet écrivain portugais.  Il habitait l’Espagne parce que sa femme était espagnole mais veuve depuis 2010, elle habite aujourd’hui le Portugal!

Depuis la place, au centre de l’arc de triomphe on peut observer très clairement les armoiries des rois du Portugal  composées des 5 plaies du Christ et dessous les 6 châteaux pris aux Maures par le Premier Roi du Portugal.  On peut y voir également les figures historiques de Vasco de Gama et du marquis de Pombal.  Cet ensemble est très impressionnant et très beau.

On retrouve dans plusieurs édifices les marques du style Manuélin.  Ce style remonte à la fin du XVe siècle alors que le roi Manuel Ier du Portugal règne sur un pays devenu une grande puissance maritime et où les grandes découvertes lui apportent beaucoup de richesse.  L’art manuélin s’inspire des découvertes maritimes.  Il emprunte au style roman et au gothique flamboyant auxquels s’ajoutent quelques inspirations mauresques.  L’abondance de motifs décoratifs liés à la marine portugaise, comme les cordages, les coquillages, les poissons, les ancres, les coraux, les vagues le caractérisent.  De plus différents instruments de navigation et toujours la croix du Christ et la sphère armillaire, symboles personnels du roi Manuel Ier, témoignent  de son pouvoir temporel et spirituel.  Ce style se retrouve aussi bien dans les églises du Portugal que dans plusieurs constructions publiques.

Il y a beaucoup d’églises au Portugal et notamment à Lisbonne.  On  apprend au fil des visites, que St Antoine de Padoue que je pensais italien, était en fait portugais.  Il s’agit de St Antoine de Lisboa canonisé un an seulement après sa mort.  On le retrouve dans plusieurs cloîtres, monastères et églises de Lisbonne.

Les différents quartiers de Lisbonne sont tous intéressants.  Celui d’Alfama est le plus connu parce qu’il abrite la place du Fado, cette musique si triste et typiquement portugaise.  Comme plusieurs place à Lisbonne on peut y accéder à pied mais, compte tenu des collines environnantes, l’utilisation de l’ascenseur est très utile.  Les ascenseurs font d’ailleurs partie du système de transport en commun de Lisbonne!  C’est très efficace même s’il y a toujours beaucoup de monde.

Au fil des visites on ne peut passer sous silence la richesse de certaines églises et de certains bâtiments.  Partout on peut remarquer les traces des nombreux territoires que les Portugais ont visités et qu’ils ont colonisés.  Les Portugais ont été les premiers européens à entrer au Japon, comme en témoignent des tableaux comme des paravents somptueux à travers la ville.  Ils ont été les premiers au Brésil où ils ont d’ailleurs établi un empire et où ils ont engagé une immigration importante.  Ils ont été les premiers au Mozambique et ailleurs en Afrique d’où ils ont fait un commerce d’esclavage très lucratif.

Pour notre visite à Lisbonne nous avons eu la chance d’avoir pour guide à l’occasion, un cousin d’un ami portugais du Québec.  Cet homme très cultivé et versé en art religieux nous a fait découvrir un aspect de son pays que nous n’aurions sans doute pas compris toutes seules.

En plus de nous faire découvrir Lisbonne du point de vue d’un Lisboète, il nous a conduit à Sintra par le bord de la mer.  Cela nous a permis de découvrir Estoril et Cascais, deux zones de villégiature très luxueuses où les étrangers forment la majorité de la population.  On y apprend que pour l’achat d’une propriété de 500 000 euros on peut obtenir le droit de résidence avec tous les avantages que cela procure notamment une exemption d’impôt durant dix ans.  Ces résidences très privées bénéficient d’une zone climatique très favorable.  C’est d’ailleurs une autre particularité du Portugal que  ces zones climatiques très délimitées.

La forêt qu’il faut traverser pour se rendre à Sintra est magnifique et on comprend pourquoi le palais royal a été établi au sommet de cette forêt.  Les étés sont chauds à Lisbonne et la cour se déplaçait au Palais de Pena pour la saison estivale.  Ce palais national a été commencé au 14e siècle par Joao I et fut achevé deux siècles plus tard par Manuel I (1469-1521), dans le style manuélin.  Cela compose un ensemble un peu déroutant avec un influence mauresque très présente.  La visite de Sintra est fabuleuse et nous n’avons pas suffisamment d’yeux pour tout voir.

Pour ceux que l’histoire intéresse, il est temps de découvrir l’histoire de ce pays pour mieux situer et comprendre ces chefs d’oeuvre.

Un pays oublié marqué par une histoire mouvementée

Aujourd’hui, le Portugal est une République.  Elle a été proclamée la troisième République en Europe (après la France et la Suisse) en 1910.  L’histoire politique de la République se partage entre une instabilité des institutions, des gouvernements militaires et une longue dictature sous Antonio de Oliveira Salazar de1933 à 1968.  Cet économiste de l’université de Coimbra a dirigé son pays d’une main de fer.  Il ne s’est jamais marié et est mort d’un AVC à 80 ans (1889-1970).

Bien qu’on lui reconnaisse des qualités d’éthique et de rigueur, il a quand même imposé une dictature rigide dont le peuple a beaucoup souffert.  Il a toutefois réussi a maintenir son pays à l’abri de la deuxième guerre mondiale.  Le Portugal n’a pas pris part à cette guerre.  En contrepartie, le pays n’a pas profité du plan Marshall visant la relance de  l’économie européenne.  Ce fait est peut-être à l’origine des difficultés économiques insurmontables ayant entraîné les vagues d’émigrations massives de l’après guerre alors que le reste de l’Europe se reconstruisait rapidement.

Après la dictature de Salazar, les premières élections libres se sont déroulées le 25 avril 1975, exactement une année après le coup d’État militaire de 1974, qualifié de surprenant parce qu’il s’est fait sans effusion de sang.  Il donna néanmoins naissance à un nouveau régime axée sur la démocratie et le respect du peuple.  Le pont du 25 avril sur le Tage se veut le symbole de ce nouvel élan vers la démocratie.  Lors de son inauguration il était le plus long pont suspendu en Europe.  Débuté sous Salazar en 1960 et nommé en son honneur au départ, il prend le nom qu’on lui connaît aujourd’hui le jour de la révolution « des oeillets », le 25 juillet 1974.  La constitution actuelle du Portugal remonte à 1976 avec quelques ajustements subséquemment.

Le Portugal a adhéré à la Communauté européenne en 1986 et de ce fait a pu bénéficier de plusieurs avantages financiers pour renouveler ses infrastructures, et cela se voit.  Malheureusement cela a couté cher au pays qui se retrouve avec des dettes difficiles à rembourser.

À Lisbonne on trouve énormément de monuments rappelant l’histoire de ce pays et de ses rois fondateurs.  Comme je m’intéresse toujours à l’histoire des pays, j’ai tenté de remonter dans le temps, pour mieux comprendre ce pays complexe, ses influences et ses habitants.

La naissance d’une nation

La nation portugaise serait la nation la plus vielle d’Europe.  Elle s’est construite sur une étroite bande de terre conquise à l’Espagne et aux principautés arabes du sud.  Tout dans ce pays est lié à la mer.  Son passé comme son avenir.

Le royaume du Portugal remonte au Moyen-Age mais on trouve des traces de la présence romaine dans différentes villes comme Evora et Conimbriga.  Le nom même du pays aurait pour origine celui de la ville romaine de « Portus Cale » soit Porto,  devenu « Portucale ».  C’est ce qui explique en gros les difficultés de la langue issue du latin, avec des influences germaniques et celtes, sans parler des langues locales.  Les Romains appelaient ce territoire « Lusitania ».  Quant aux arabes, ils ont conquis le sud du Portugal (aujourd’hui l’Algarve) en 711 et le dirigeait à distance par le califat de Cordoue, appartenant à l’Espagne musulmane.

Il aura fallu un demi siècle aux arabes pour s’emparer de tout le territoire portugais actuel.  Malgré la domination des Maures, l’influence des musulmans n’est pas marquée dans le nord du pays.  Par contre, elle est très forte en Algarve évidemment et un peu aux alentours de Lisbonne, particulièrement à Sintra.  D’ailleurs, les « azulejos » ou l’art national de travailler les carreaux de céramique, une particularité architecturale portugaise, serait hérité des arabes.  Ces Azulejos ne servent pas seulement de décoration.  Ils servent également d’isolation et de protection contre les intempéries.  Les premiers azulejos servaient à couvrir les murs de Sintra.  On remarque qu’il n’y a pas encore de figures, seulement de la géométrie d’inspiration arabe.  Ailleurs dans Lisbonne et Porto, la décoration prend plus de place.  À cet égard, la gare de Lisbonne est un magnifique exemple du travail des azulejos!

L’éclatement du califat de Cordoue en plusieurs petits royaumes en 1037 a permis à Ferdinand 1er, dit le Grand, roi de Castille, de reconquérir les territoires au sud du Douro en enlevant plusieurs villes aux Maures jusqu’à sa mort en 1064.  Plus tard, en 1087 l’un de ses cinq fils, Alphonse VI, roi de Leon et de Castille continuera l’oeuvre de son père.  Il entreprendra la reconquête de la Nouvelle-Castille avec l’aide de plusieurs chevaliers français dont Raymond  et son cousin, Henri de Bourgogne.  À l’époque, la France et l’Espagne (la Castille) étaient alliées.

En reconnaissance à ses alliés français venus l’appuyer dans sa conquête des Maures, le roi Alphonse VI (de Leon et de Castille) leur accordera la main de deux de ses filles.  Sa fille légitime Urrica épousera Raymond alors qu’Henri de Bourgogne épousera Teresa De Leon, la fille illégitime d’Alphonse VI.  Il deviendra « Henrique » et en remerciement pour services rendus il recevra en dot le comté de Portucale (condado portucalense) soit la région entre les deux fleuves importants du pays: le Douro et le Minho.

En 1139, le fils d’Henri de Bourgogne et de Teresa De Leon, Alfonso Henriques poursuivra l’oeuvre de conquête en remportant une bataille décisive contre cinq rois Maures à Ourique au sud du Portugal actuellement l’Alentejo. Après avoir été acclamé par ses troupes, il se proclamera Roi en 1140.  Il devient Alfonso I, premier roi du Portucale.  Ce sera le début de la dynastie de Bourgogne.

Il aura fallu sept ans pour que le roi espagnol, Alphonse VII reconnaisse l’indépendance du nouvel État portugais.  Malgré cette reconnaissance, le nouvel État vivra toujours sous la menace permanente des rois (espagnols) de Leon et de Castille.

Grâce au premier roi Alfonso I, de puissants ordres religieux vont s’installer dans le nouvel État. Les Templiers, les Cisterciens et les Hospitaliers deviendront les défenseurs contre les Maures.  Nous sommes en pleine période des croisades en Europe.  Aussi, poursuivant sa conquête, Alfonso I souhaite reprendre Lisbonne des mains des musulmans.  Il pourra bénéficier des chevaliers de la deuxième croisade qui, en route vers la Terre Sainte, lui permettront de prendre Lisbonne en 1147.  Il avait épousé Mathilde de Savoie en 1146.  Ils auront sept enfants dont le premier, Sanche I, lui succédera en 1189.  Alphonse I est enterré au monastère de Sainte-Croix à Coimbra.  Il aura régné 49 ans.

Sanche I sera le deuxième roi du Portugal.  Il règnera 26 ans.  On le surnommera le roi Laboureur, le roi Fondateur et même le roi colonisateur parce qu’il fit venir des émigrants de Flandre et de Bourgogne pour peupler graduellement son royaume.  Pour solidifier sa position et surtout l’indépendance du Portugal dans l’espoir de conserver son royaume, il épousera Douce d’Aragon, fille du comte de Barcelone et de Pétronille d’Aragon, reine d’Aragon à la mort de son père.  Une alliance par laquelle le roi d’Aragon, ennemi traditionnel de la Castille, reconnaît le royaume du Portugal.

De cette union naitront onze enfants légitimes, dont Alfonso II qui succèdera à son père comme troisième roi du Portugal en 1212.  Peu enclin aux activités militaires ses premières années de règne furent néanmoins marquées par de violents conflits avec ses frères et soeurs, aboutissant à l’exil de ces derniers en Castille et à la confiscation de leurs biens.  Une fois le calme revenu, il s’attardera à consolider la structure sociale et économique du pays.  Malheureusement son règne est marqué par un important conflit avec la papauté dont il contestait l’influence et la richesse, au détriment du développement de son royaume.  À l’époque, les papes décidaient du sort des rois.  On peut donc présumer de la suite…

Alfonso II aura cinq enfants de son mariage avec Urraque de Castille, fille d’Alphonse VIII de Castille et d’Aliénor d’Angleterre.  Le premier fils, Sanche II succéda à son père comme quatrième roi du Portugal en 1223 et règnera 24 ans alors que son père n’aura régné que durant onze ans.  Plus intéressé à reprendre les territoires du sud aux Maures, il négligea le conflit avec la papauté et l’administration du royaume avec pour conséquence des intrigues et des conflits ayant conduit à son excommunication.  Par une bulle papale, Innocent IV ordonna au peuple de se choisir un nouveau roi.  C’est le frère cadet du roi excommunié, Alphonse comte de Boulogne, qui héritera de la couronne.  Après avoir abdiqué de ses terres françaises et marché sur le Portugal, il prendra la couronne portugaise comme cinquième roi du Portugal.  Alfonso III devient roi en 1247 à Coimbra,alors que son frère Sanche II est exilé à Tolède.

Bon administrateur, il s’occupe de l’Eglise et des commerçants et assure le développement des villes.  Une fois l’ordre rétabli, il poursuit la conquête des terres du sud.  En 1249, Alfonso III conquiert l’Algarve, dernier bastion des rois Maures.  Il fait de Lisbonne la capitale du royaume en 1256 en même temps qu’il définit les limites du Portugal actuel.  Un conflit avec la Castille au sujet des terres de l’Algarve sera règIer par un mariage avec l’infante Béatrice de Castille qui lui donnera huit enfants.  Ce mariage sera enfin rendu possible par le décès de sa première épouse en 1259, la française Mathilde de Dammartin, comtesse de Boulogne.   L’infante Dinis naîtra durant le conflit avec la Castille.  Il sera finalement légitimé vers 1263.  Dinis succédera au roi Alfonso III à sa mort en 1279 après un règne de 32 ans.

Dinis I (Denis Ier) sixième roi du Portugal réussira à consolider le pays et contribuera à améliorer son administration et ses richesses.  Il sera nommé le « roi laboureur » à cause de l’importance accordée à de nouvelles méthodes d’agriculture.  C’est lui également qui met sur pied la première organisation maritime en recourant aux compétences des navigateurs génois.  Il règnera 45 ans.  On le reconnaît comme un roi pacificateur.  Il épousera en 1282 Isabel d’Aragon, dite Sainte Isabel,  petite nièce de Sainte Elizabeth de Hongrie.  Elle lui donnera deux enfants dont le septième roi du Portugal, Alphonso IV surnommé le vaillant qui règnera à son tour 32 ans.

Devenu Roi du Portugal en 1325, Alfonso IV, dit le Brave, exila son frère en Castille lequel intrigua continuellement.  Néanmoins Alfonso IV joignit ses forces à la Castille pour vaincre les Maures en 1340 tout en poursuivant la lutte de ses prédécesseurs contre la mainmise de l’Eglise sur le pays.  Il épousa Béatrice de Castille avec laquelle il aura huit enfants.

Sous son règne, une lutte interne chez ses voisins de Castille provoquera une fuite de nombreux nobles espagnols (castillans) vers le Portugal.  Ces émigrants cherchèrent à retrouver leurs privilèges à la cour portugaise en créant une faction à la cour.  Cette faction augmenta son pouvoir après qu’une fille d’un important membre de la noblesse et Dame d’honneur de la princesse Constance de Castille se fit remarquer par Pedro, fils héritier du roi.  Ce dernier avait déjà dû épouser Constance de Castille en 1339.  Cette dernière mourut en 1345 après la naissance de leur troisième enfant.  La Dame d’honneur au nom d’Inês de Castro était devenue la maîtresse du futur roi avant le décès de son épouse et ce, malgré l’opposition du roi Alfonso IV qui craignait les intrigues des Castillans.  Ne pouvant influencer l’amour de son fils, le roi aurait fait assassiner Inês de Castro en 1355.

Cela n’a certainement pas calmer le conflit entre le fils Pedro et le roi son père.  Pedro a eu quatre enfants avec Inês de Castro.

Au décès du Roi Afonso IV, Pedro 1er devint le huitième roi du Portugal en 1357 deux ans après l’assassinat de sa bien aimée Inês de Castro.  Ce roi que l’on a appelé le justicier, règnera 9 ans durant lesquelles il fait couronner Inês de Castro post mortem, sous prétexte de leurs épousailles secrètes en 1354 à Bragance.  La légende était née.  Elle se poursuivra à travers le temps allant jusqu’à inspirer une oeuvre littéraire d’Henry de Montherlant intitulée « la Reine Morte ».  Le roi Pedro Ier décédera en 1367 laissant le trône au second fils issu de son premier mariage.

La dynastie de bourgogne s’éteindra avec le neuvième roi du Portugal, Fernando I (1367-1383) deuxième fils de Pedro Ier et Constance de Castille qui règnera 16 ans.  Fernando I épousera Eléonore Teles de Meneses qui lui donnera une fille du nom de Beatriz.  Après la mort de Fernando I, Lisbonne se révolte contre une éventuelle unification avec la Castille et la seule fille du couple royale ne réussit pas à accéder au trône malgré les tentatives de sa mère.  Il s’en suivra une période de deux années d’instabilité royale!

Deux héritiers se disputeront alors la couronne du Portugal:  Jean, fils illégitime de Pedro et d’Inês de Castro appuyé par la Castille et soutenu par les français et, Jean le Grand Maître d’Aviz appuyé par la noblesse portugaise soutenu par les anglais.

La noblesse portugaise proclamera Joao d’Aviz, Joao I, dixième roi du Portugal en 1385.  Ce sera la fin de la dynastie de Bourgogne et le début de la dynastie des Avis au Portugal. Joao Ier épousera Philippa à Porto le 2 février 1387.  Elle est la fille du duc de Lancastre et la soeur d’Henri IV d’Angleterre.  Cette union renforcera ainsi par les liens familiaux, les accords du traité luso-britannique de 1373.  Il mourra en 1433 après avoir signé un traité de paix avec la Castille qui reconnaît enfin l’indépendance du royaume du Portugal.  Il aura régné 48 ans et laissera neuf enfants.  Ces enfants seront reconnus comme « l’illustre génération » du fait que chacun des enfants a, à sa manière, marqué l’histoire du Portugal et même de l’Europe.

Malgré le siège des espagnols, et les nombreuses batailles qui suivront, la dynastie des Avis se poursuivra de 1385 à1508 au bénéfice du Portugal.  C’est la période de l’expansion maritime.  C’est le fils aîné Edouard, qui deviendra onzième roi du Portugal. sous le nom de Edouard Ier (Duarte ou Edourdo I).  Il aura neuf enfants avec Éléonore d’Aragon.  Son fils Alphonse V (1432-1481) lui succédera comme douzième roi du Portugal en 1438.  Il fera sa marque pour ses conquêtes au nord de l’Afrique.

Par contre, c’est son oncle, le frère d’Edouard Ier, troisième fils de Joao I et de Philippa, l’infant Henrique, qui a organisé pour le Portugal l’exploration systématique de l’Atlantique et des côtes marocaines.  Curieusement, Henri le Navigateur (1394-1460) n’a jamais navigué, mais c’est avec lui que débute les grandes découvertes portugaises:  Ceuta, Madère (1419), les Açores (1427), le cap Boujdour (Bojador) alors considéré comme la limite sud du monde connu. Les découvertes se poursuivent: en 1434, le cap Blanc en Mauritanie (1441), les îles du Cap-Vert (1445), puis Sierra Leone et le golfe de Guinée.  À la mort d’Henrique, l’activité maritime est une priorité nationale et plusieurs pays européens commencent à s’y intéresser.  Sa statue se retrouve presque partout à travers le Portugal.

Après lui, les portugais ont découvert les nouveaux mondes en franchissant le Cap de Bonne-Espérance (1488) jusqu’à l’océan Indien.  En 1494, le traité de Tordesillas partagera les nouvelles terres conquises entre le Portugal et l’Espagne. Il attribue aux Portugais les territoires situés à l’est d’une ligne tirée d’un pôle à l’autre et passant à environ 2 000 km à l’ouest des îles du Cap-Vert.  Il leur laisse la possession de l’Afrique mais aussi celle de la côte brésilienne, qui n’a été découverte qu’en 1500 par Pedro Alvares Cabral, pendant que Vasco de Gama découvrait la route des Indes (1498).

Au décès du roi Duarte I, son fils Alfonso V succède à son père après un régence de quelques années, car à la mort du roi, l’enfant n’a que quatre ans.  À son décès, son fils Joao II lui succède pour régner 14 ans comme treizième roi du Portugal.  Ce dernier continue l’oeuvre de son grand oncle, l’infant Henri.  Il appuie des explorations toujours plus audacieuses.  À son décès en 1495, c’est son cousin Manuel Ier qui accèdera au trône après plusieurs intrigues par l’aristocratie de Lisbonne afin d’éviter qu’un prince lié à la Castille ne reprenne le royaume du Portugal.  Il règnera 26 ans jusqu’en 1521.

À cette époque Manuel Ier, quatorzième roi du Portugal (1495-1521) et Charles Quint se « partagent le monde ».  Les Portugais iront jusqu’au Japon et obtiendront des concessions en Chine alors que Macao sera offerte beaucoup plus tard au roi du Portugal en 1557. Manuel Ier a imposé un nouveau style architectural qualifié de « manuélin » dont j’ai parlé plus haut.

Malheureusement, le Portugal n’échappera pas à l’inquisition au milieu des années 1500.  Suivra une domination espagnole. Philippe II d’Espagne (1581-1598), lui-même fils et petit-fils de princesses portugaises, prendra pour la quinzième fois, la couronne portugaise.  Sous ses successeurs Philippe III (1598-1621) et Philippe IV (1621-1640) le Portugal est réduit au rang de province espagnole.  Il perdra sa puissance coloniale.

La Hollande lui ravira d’importants territoires en Afrique et aux Indes orientales.  Heureusement pour lui, la résistance locale conserve le Brésil dans le giron portugais.

La noblesse portugaise n’avait pas dit son dernier mot et profitant de l’insurrection des Catalans contre Philippe IV, elle proclame le duc de Bragance, Joâo IV, seizième roi du Portugal en décembre 1640.  Cela marque ce que les Portugais appelle la Restauraçao.  La dynastie de Bragance se maintiendra au pouvoir jusqu’en 1910.

Joâo IV reprendra en main l’empire colonial.  Il mariera sa fille Catarina avec Charles II d’Angleterre, consolidant la vieille alliance entre les deux pays.  Ils auront deux fils:  Alfonso et Pedro.  Alfonso régnera comme dix-septième roi de 1656 à 1667 sous le nom Alfonso VI.  Pedro parviendra à faire déposer son frère pour devenir le dix-huitième roi, Pedro II, de 1683 à 1706.

Le Portugal retrouvera son statut de puissance européenne en consolidant son alliance avec l’Angleterre.  C’est le début de l’expansion vers le Brésil à cause de ses immenses ressources aurifères.  C’est aussi la période de l’épanouissement du baroque dans les arts et l’architecture ainsi que celle des grandes améliorations urbaines.  Encore aujourd’hui on peut jouir de tous ces chefs d’oeuvre à travers tout le pays.

Malgré un passé mouvementé, le Portugal a réussi à ne pas être impliqué directement dans la deuxième guerre mondiale avec pour conséquence que ses villes ont conservé pratiquement intactes ses nombreux trésors historiques.

Durant la période de la dynastie de Bragance (1640-1910) le Portugal aura accès au marché britannique pour son porto tout en poursuivant ses intérêts au Brésil par la mise en valeur et l’appropriation des richesses aurifères de ce pays.  Sous cette dynastie, le pays subira des transformations majeures en particulier sous la direction du Marquis de Pombal (1699-1782) agissant comme secrétaire d’État du roi José I, vingtième roi et fils de Joâo V, lui-même fils de Pedro II.

Malgré un terrible tremblement de terre en 1755 au cours duquel Lisbonne est presque détruite, Pombal, qualifié d’homme des Lumières, imposera sa vision de la modernité sur tout le pays.  Il reconstruira rapidement toute la ville.  Ses réformes ont touché tous les aspects de la société.  On lui doit Lisbonne telle qu’elle est aujourd’hui.  Malheureusement, l’homme fort du Portugal se durcira à la fin de sa vie avec la reprise du conflit opposant le Portugal à l’Espagne.  Il expulsera les jésuites lors de ses réformes de l’éducation entre 1759 et 1772.  Pour certains, c’était un dictateur exigeant et pour d’autres un homme visionnaire.  Il était sans doute un peu des deux!

Au décès du roi José, la fille de ce dernier, Maria I montera sur le trône en 1777 et remettra en cause certaines réformes religieuses.  Elle fera revenir les Jésuites.  Heureusement, elle ne remettra pas en cause le développement scientifique.  Elle sera écartée du trône en 1792, pour cause de démence.  Son fils Joao VI prendra la régence dès 1791 et deviendra en 1799 le vingt-deuxième roi du Portugal.

Allié de l’Angleterre, le Portugal affrontera et vaincra les troupes Napoléoniennes.  De 1807 à 1810, Napoléon tentera en vain de conquérir le Portugal.  À trois reprises les expéditions de Napoléon vont échouer grâce aux renforts anglais.  Commandés par le général Wellington, la dernière bataille de 1810 mettra fin aux ambitions de Napoléon en terres portugaises. On trouve d’ailleurs différents monuments à cet effet à travers  le pays.  Les soldats français étaient réputés pour tout voler sur leur passage.  Aussi les familles cachaient leur argenterie dans les murs des maisons afin de les épargner du pillage!

Durant cette période guerrière, la monarchie portugaise se déplacera au Brésil où le roi établira sa cour royale en 1808 à Rio.  C’est d’ailleurs un fait unique dans l’histoire européenne que pendant dix ans, une ville coloniale, Rio de Janeiro, sera la capitale d’un Etat européen possédant un empire colonial.  Ce fait a été crucial dans l’accession à l’indépendance du Brésil.

Le roi Joâo VI ne rentrera au Portugal qu’en 1821 alors que son pays est devenu une dépendance britannique.  Il aura deux fils, dont le premier se proclame Pedro I empereur du Brésil en 1822.  A la mort de son père il accèdera au trône mais ses intérêts vont vers le Brésil.  Il abdiquera du trône en faveur de sa fille âgée de sept ans Maria (Maria II) qu’il fiancera à son frère Miguel qui deviendra régent.  Ce dernier se proclamera roi en 1828 contrairement à ses promesses.  Son règne sera court mais mouvementé de telle sorte que sa jeune reine devra se réfugier à Londres durant cette période dite « migueliste ».   Pedro I abdiquera de la couronne impériale du Brésil en faveur de son fils Pedro II, pour revenir mettre de l’ordre.  Aidé de la France il réussira à exiler Miguel définitivement en 1834.  La jeune reine peut rentrer triomphalement à Lisbonne à l’âge de14 ans.  Maria II (1819-1853) épousera Ferdinand de Saxe- Cobourg-Gotha en 1836.

Les successeurs de Maria II seront Pedro V, Luis I et Carlos I.  Leurs règnes seront marqués par la volonté du Portugal de tenir son rang dans le découpage colonial de l’Afrique malgré les nombreuses difficultés internes du pays.  La monarchie s’éteindra entre 1908 et 1910 après l’assassinat du Prince héritier et du roi Carlos I en 1908 alors que le prince cadet règnera durant deux autre années difficiles sous le nom de Manuel II.

La république du Portugal sera proclamée le 5 octobre 1910 après une courte révolution.  La période qui suivra sera très instable et durera seize années jusqu’au coup d’État militaire de 1926.  Durant cette période le Portugal participera à la Première Guerre mondiale aux côtés de la France (1916-1918).

Après un soulèvement militaire en 1926, l’armée fait appel à un jeune professeur de Coimbra du nom de Antonio Oliveira de Salazar pour occuper le poste de ministre des Finances.  N’ayant pas les mains libres, il se retire pour mieux revenir plus tard à ses propres conditions.  En 1933, il révise la constitution créant l’Estado Novo (État nouveau).  Il dirigera en tant que président du Conseil de l’État nouveau.  La Présidence de la République reviendra à un militaire et ne sera qu’honorifique.

Salazar  dirigera le Portugal durant 35 ans jusqu’en 1968, année où il se retire pour cause de maladie.  Sous sa direction, le Portugal réussira à maintenir une neutralité lors de la guerre d’Espagne et lors de la deuxième guerre mondiale.  Il parviendra également à faire du Portugal un membre fondateur de l’OTAN.  Très strict, religieux et austère, il refuse la décolonisation et entraînera le Portugal dans un guerre sans issue en Guinée, en Angola et au Mozambique contre les mouvements de libération.  Il épuisera son peuple avec ces confrontations.

Sur le plan européen le Portugal participera à l’association européenne de libre-échange (AELE) créé en1959 par la Grande Bretagne et les pays scandinaves, en rivalité avec le Marché commun.  Mais Salazar sera un véritable dictateur avec sa police politique (PIDE) dont le fort de Caxias, à l’embouchure du Tage près de Lisbonne, témoigne encore de sa violence.

Ce qui est étonnant c’est que ce professeur d’université ait maintenu son peuple dans l’ignorance avec un taux d’illettrisme élevé et un isolement difficile à expliquer.  Le pays restera agricole sous son règne et la modernité lui échappera.

Malgré les nombreuses tentatives de renversement du régime en place, ce n’est qu’avec le coup d’État militaire du 25 avril 1974 que le régime de Salazar est écarté.  De jeunes capitaines inconnus auraient conçu et dirigé toutes les opérations.  On dit que ce renversement de régime se singularise par le caractère profondément démocratique du « mouvement des capitaines ».

Les premières élections libres du Portugal étaient un point d’honneur pour les capitaines et se sont déroulées en toute légalité démocratique avec 91,73% de participation.  Une constitution est votée en 1976 et sera révisée en 1982 mettant fin à une période fragile.  En effet, les ex-colonies auxquelles Salazar tenaient tant, ont été  abandonnées dans des situations catastrophiques après la révolution de 1974.  Le processus d’évolution du Portugal  se terminera par la signature du traité d’adhésion à la Communauté européenne en 1986, achevant ainsi la consolidation de la démocratie portugaise.

Aujourd’hui deux formations politiques alternent au pouvoir à savoir le PS (parti socialiste) et le PSD (parti social démocrate).  La dernière élection a vu la réélection du PSD dimanche le 4 octobre 2015.   Par contre, une coalition des partis d’opposition a renversé le pouvoir quelques semaines plus tard.  L’avenir dira si la relance économique effectuée par le PSD se poursuivra sous la coalition socialiste.

A l’heure de notre séjour, le salaire minimum était d’environ 500-700 euros par mois et le pays jouissait de certains avantages étonnants comme le congé de paternité de dix jours, obligatoire pour les pères!  De plus, le  PSD avait procédé à la vente de plusieurs entreprises d’État, dont l’électricité du Portugal (EDP) vendu aux Chinois.  L’objectif est de rembourser les dettes du pays accumulées depuis son adhésion à l’Euro.

Le pouvoir exécutif revient au premier ministre de cette République démocratique.  Le Président de la République est élu au suffrage direct pour cinq ans sans pouvoir exécutif excepté celui de veto sur les lois ou celui de dissolution du Parlement.  Il nomme le Premier Ministre en fonction de la majorité du Parlement, à savoir une chambre de 230 députés élus au suffrage direct pour quatre ans.  Il est intéressant de noter que les Açores et Madère sont deux régions autonomes depuis 1976.

Le passé impérialiste de ce pays a laissé des traces culturelles importantes.  Mais contrairement à ce que l’on pourrait penser, on ne sent pas du tout de racisme envers les populations métissées.  C’est même surprenant de constater une intégration ethnique aussi réussie, du moins en apparence.

La découverte du pays

Sans avoir eu la chance de parcourir tout le pays, notre voyage nous a quand même conduit de Lisbonne à Coimbra puis à Porto.  Le Portugal présente la particularités de zones climatiques très délimitées.  Ainsi alors que Sintra profite d’un climat frais à cause de la forêt absolument magnifique et haute qui l’entoure, Lisbonne, Estoril et Cascais jouissent d’un climat plus méditerranéen.  La température de l’eau y varie entre 15 et 20C à l’année.

À Lisbonne, la visite du Monastère de Geronimo (ordre de Saint Jérôme au XIVe ) est impressionnante et les richesses de ce monastère renversantes.  Les tombes de Vasco de Gama et celle du premier poète du Portugal Luis de Camôes se retrouvent dans l’église du monastère.  Il semble que les objets de culte en or et en argent aient été cachés dans les caves du monastère durant les invasions françaises.  Ainsi ce n’est qu’au XXe siècle que l’on y a découvert un tabernacle de grande richesse en argent solide.  D’ailleurs les soldats français avaient la réputation de voler et de saccager tout, incluant les tombes, pour s’emparer des richesses portugaises, incluant le trésor épiscopal.  Même si les troupes de Napoléon n’ont jamais réussi à s’emparer du Portugal ils y auraient quand même fait pas mal de dégâts.

Au musée des antiquités de Lisbonne on peut juger de la richesse passée du pays et de ses impressionnantes relations internationales par les oeuvres offertes par les pays visités et conservées encore au musée.  Toutes les églises de la ville témoignent aussi de la richesse passé du pays et de la puissance de l’Église.

Aux portes des maisons, on voit souvent des azulejos témoignant du passé du pays dans un style baroque du 18e siècle.  Ces carreaux portugais sont très différents des carreaux hollandais même si à première vue on dénote une certaine ressemblance.

Les églises de Lisbonne rivalisent en richesse et en histoire religieuse.  Tous les ordres religieux qui y sont passés ont laissé des églises et des monastères magnifiques.  L’ordre des Franciscains, dont le monastère de Bragance aurait été fondé par saint François lui-même, a laissé une église d’une richesse incroyable à Porto.  Dans toutes ces églises ont trouvent plusieurs retables commandités par divers rois et aristocrates pour différentes occasions.  On peut juger de la richesse et de la puissance d’une église par le nombre d’espaliers au-dessus du maître autel.  Plus leur nombre est élevé plus le commanditaire était important allant jusqu’au roi en passant par les ducs et les duchesses.  Je ne me souviens pas exactement du nombre  maximal, mais il me semble que sept espaliers représentaient une commandite maximale de la part d’un duc!

Je ne peux pas dire combien il y a d’églises à Lisbonne, mais il y en a beaucoup.  De l’Église des Martyrs où fut baptisé le poète Fernando Pessoa en passant par la Sé, vieille cathédrale de Lisbonne et la vieille Igreja Da Conceicâo velha dont la façade seule est restée debout après le tremblement de terre de 1755.  Toutes sont intéressantes et richement décorées reflétant la fortune passée de ce pays.

Coimbra

Après pratiquement une semaine à Lisbonne on se déplace vers Coimbra à environ deux heures par train.  Le train Alfa est un train rapide qui nous permet de traverser une partie du pays.  On circule à travers des régions où l’on peut voir de nombreuses oliveraies et différentes cultures.  Cette première capitale du Portugal est prestigieuse.  Cette ancienne cité romaine, ravie par les Maures et reconquise par Ferdinand le Grand, roi de Castille devint la Capitale du Portugal en 1139.  Elle le demeurera jusqu’en 1256.  C’est une ville universitaire sise sur la rive droite du fleuve Mondego, qui a gardé non seulement ses richesses passées mais également son charme médiéval.

Coimbra abrite encore aujourd’hui la première université portugaise fondée à Lisbonne par le roi Dinis l, le Ier mars 1290 et, transférée à Coimbra en 1308.  Après avoir été logée dans les murs du monastère de Santa Cruz, elle fut déménagée dans l’ancien palais royal dominant la colline.  D’ailleurs on voit la tour de l’université de très loin.  C’est le point de référence de la ville.

L’université possède la plus vieille bibliothèque du Portugal.  La bibliothèque Joanina (1717-1728) est impressionnante avec des influences du monde connu à l’époque allant de l’or du Brésil à la décoration orientale.  Le roi Joao III (fils de Manuel Ier) l’aurait comblée de richesse pour en faire un véritable joyau.  L’histoire veut que cette bibliothèque ait été construire parce que le beau frère du roi, (Charles Quint époux de la soeur de Joao Ier), en avait fait construire une pour lui en Autriche.  Le roi du Portugal aurait alors décidé d’en faire construire une plus belle et plus riche que celle de son beau frère.

Ce qui est intéressant à Coimbra c’est de voir se balader dans la ville ces jeunes vêtus de jupe ou de pantalon noir avec chemise ou chemisier blanc, enveloppée d’une grande cape, noire également.  Ces étudiants vont d’édifice en édifice, se promènent d’un pavillon et d’une faculté à une autre.  Il y règne une atmosphère studieuse et sympathique.  Plusieurs tiennent malgré tout leur cellulaire à l’oreille, mais on peut penser que c’est pour leurs études!  Des groupes de musiciens se trouvent à l’occasion sur les places de la ville et fournissent une animation fort agréable.  il semble que des étudiants de plus de 80 pays se trouvent aux études à Coimbra.

Nous logeons de l’autre côté de la rive du Mondego à la Quinta das Lagrimas.  C’est dans « l’hôtel des larmes » qu’aurait été assassinée Inês de Castro qui y rencontrait son amant, Pedro, dans le parc historique autour.  Sur le site de l’hôtel on peut découvrir la fontaine des larmes que la légende attribue aux larmes d’Inês.  Tout près, on peut encore voir le ruisseau des amours qui coulait vers le couvent et sur lequel les petits bateaux de Pedro apportait des messages d’amour à sa maîtresse.  Cet hôtel, membre des Relais et Châteaux, est aujourd’hui un hôtel de congrès avec spa, golf et restaurant reconnu, le tout dans une forêt quand même assez bien conservée.  Nous logions dans une vieille partie de l’hôtel pensant que ce serait plus authentique.  Dans les faits, il vaut mieux loger dans la partie plus moderne à cause du bruit des terrasses au pied des chambres de la partie plus ancienne.

Du même côté du fleuve Mondego que la Quinta das Lagrimas se trouve le monastère de Santa Clara où habitait Inês de Castro.  Ce monastère fondée au XIIIe siècle est lié à Isabel, la reine sainte.  La légende veut que cette reine, la femme du roi Dinis I s’occupait des pauvres et des indigents à la défaveur des conseillers du roi.  Un jour d’hiver, alors que les conseillers du roi prétendaient qu’elle allait porter de l’argent et des vivres aux pauvres, le roi l’aurait sommé de montrer ce qu’elle cachait dans ses vêtements.  Elle ouvrit son manteau et c’est un bouquet de roses qui tomba de son manteau.  Ce miracle lui est attribué comme plusieurs autres.  Elle est enterrée dans le monastère de Santa Clara.

Nous quitterons Coimbra avec en mémoire ce dernier souvenir.

Porto

Le déplacement vers Porto se poursuit en train rapide. Le trajet est facile et l’arrivée efficace.  Un taxi nous conduit à la maison de village que nous avions retenue pour la semaine.  Notre pied à terre se trouve dans le vieux village de Foz do Douro. C’est l’embouchure du Douro.  D’un côté c’est le Douro et de l’autre, c’est l’Atlantique.  Un endroit magnifique!  Le long du boulevard qui longe la mer on peut voir de magnifiques palmiers importés du Brésil et d’Afrique.    D’ailleurs il semble qu’en 1975, les communistes avaient voulu les enlever tous, sous prétexte que cela était « trop bourgeois »,  Mais la contestation a été telle qu’ils sont demeurés intacts.  Fort heureusement d’ailleurs parce que cela donne beaucoup de charme à la rue du bord de mer.

La maison est dans le village de Foz Do Douro, à environ 50 mètres de la rue qui borde le Douro et la mer.   J’écris « le village » mais dans les faits, il s’agit bien de Porto.  C’est la section de villégiature de Porto à l’embouchure du fleuve et sur la mer.  Ce quartier est en plein développement et l’architecture y est fort intéressante.

La maison est petite et discrète de l’extérieur mais élégante à l’intérieur.  C’est une maison ancienne qui a été reconstruite à l’intérieur selon les plans d’un grand architecte portugais, Eduardo Souto de Moura récipiendaire du Prix d’architecture Priztker en 2011.  Elle comptait 4 chambres d’où son appellation « the 4Rooms » bien affichée à la porte d’entrée.  Aujourd’hui la maison ne compte que trois chambres car l’autre qui se trouvait à proximité de la maison et non dans la maison, a été vendue.  Deux chambres se trouvent à l’étage.  Elles sont plutôt petites mais très confortables avec chacune leur salle de bain complète.  Un salon/salle à dîner intime comme la cuisine, avec un joli jardin intérieur sur lequel donne une autre chambre de l’autre côté du  jardin.  Tout y est dans cette maison aménagée avec goût.  Tout est conçu d’une grande efficacité avec des équipements haut de gamme au design Alessi.  Une adresse à conserver.  Il y a même un foyer à l’éthanol dans le salon pour les soirées froides d’hiver sans doute… Nous n’en avons pas eu besoin!

Une fois vantées ce lieu de séjour, notre visite de Porto peut commencer.  Cette ville est passionnante.  Même si on la connaît pour sa boisson, la ville de Porto est peu connue.  Il semble toutefois que cela ne durera pas parce que tout dans la ville est en restauration et la ville mise beaucoup sur le tourisme.

Cela dit, Porto est une ville intéressante.  On parle de Porto comme étant la « résistante ».  Elle n’a jamais été vaincue ni par les Maures, ni par les français, ni par les anglais.  Les Portuans sont souriants, serviables et chaleureux.  Le tourisme est important pour cette ville.  Tout le monde semble en être conscient.  Quoique la ville soit un peu défraîchie à certains endroits, une restauration massive est en cours.  Cela correspond à un engagement de la ville et c’est clairement affiché à travers la ville.

Porto n’a jamais été une capitale du Portugal, contrairement à Coimbra ou Lisbonne.  Porto est une ville marchande.  C’est une ville étagée sur la rive du Douro.  Son port étant particulièrement accessible, il n’est pas difficile d’imaginer l’intérêt commerçant de cette ville.  Porto vibre sous l’intérêt commercial et son histoire en témoigne.  En y réfléchissant bien, Porto est une peu vis à vis de Lisbonne, ce que Montréal est vis à vis de Québec avec la différence que Montréal est plus populeuse que Québec alors que Porto l’est moins que Lisbonne.

Jusqu’en 1996, Porto abritait une Bourse de valeurs.  Cette dernière est maintenant concentrée à Lisbonne depuis 2001.  L’histoire économique de Porto est bien sûr étroitement liée au vin de Porto.  Mis au point dans l’antiquité, le « vin de Porto » a été qualifié au XVIIe siècle alors que le marquis de Pombal créait en 1756 un comité devant déterminer les critères de qualité de ce vin, afin d’en assurer une qualité constante.  C’est pratiquement la naissance des « appellations d’origine ».

Le porto devait donc répondre à certains critères de production.  Il devait être transporté en fûts à Vila Nova de Gaia, en face du vieux Porto, de l’autre côté de la rive du Douro.  On peut encore voir les barques anciennes devant le vieux port de Porto et la Ribeira, où ces barils étaient stockés, et ensuite mis en bouteille et livrés par bateau majoritairement vers l’Angleterre, principal consommateur de ce vin encore aujourd’hui.

La ville de Porto témoigne de cette histoire commerçante par des édifices richement décorés témoins de la fortune passée.  En particulier, l’édifice de la Bourse (Palacio da Bolsa) devenu le siège de la chambre de commerce de Porto.  Tout dans cet édifice impressionne.  Le plancher est composé de mosaïques inspirées de Pompei et l’escalier central est majestueux.  Les deux lustres de cristal de la salle principale pèsent une tonne et demie chacun.  Tout autour de cette salle on peut voir les blasons de toutes les villes avec lesquelles Porto fait du commerce.  La richesse de l’architecture et de la décoration nous permettent d’évaluer la puissance des commerçants.  On prétend que l’oeuvre des artistes qui ont réalisé les chefs d’oeuvre de l’édifice visait à démontrer qu’à Porto on pouvait imiter n’importe quoi.  Les murs de l’édifice sont magnifiques et on jurerait qu’ils sont en bois.  Dans les faits, il sont en plâtre imitant parfaitement le bois.  Seul le plancher est en bois.  Parmi les différentes pièces on peut visiter la salle de l’ancien tribunal du commerce où des toiles magnifiques symbolisant la loi et la justice trônaient au dessus des juges.

Le palais possède également un salon dit le « salon arabe ».  Même si toutes les pièces de cet édifice sont impressionnantes, le salon arabe est le plus intéressant pour son audace.  L’histoire veut que les marchands de Porto souhaitaient prouver à la capitale, que l’Eglise n’avait pas d’influence chez eux.  À cette époque, les Francs Maçons étaient très présents dans le pays. Ce salon se veut donc un pied de nez, et peut-être  une provocation à l’Église et à son emprise.  Aménagé en 1880 il aurait requis 18 ans de travail et les écrits comme « gloire à Allah » ou « Allah protège la reine » nous font réfléchir…  C’est d’autant plus curieux que Porto est la seule ville du pays qui n’ait jamais été conquise par les arabes!

Jouxtant l’édifice de la bourse se trouve l’église de Saint François où l’étoile de David trône au dessus-de la porte principale.  Puis la visite de la Tour des clercs, symbole de la ville de Porto que l’on retrouve sur plusieurs images touristiques suivi de la visite de l’église et du monastère des carmélites dans le même espace est également impressionnant.

C’est dans le même environnement que nous visitons la plus belle librairie au monde, la librairie Leillo inaugurée en 1906.  Une architecture magistrale sous forme de navire nous accueille dans ce lieu où les touristes font la queue.  C’est un endroit emblématique de Porto.  Il faut maintenant payer pour la visiter mais si on achète quelque chose, on nous crédite le prix de l’entrée.  Je m’y suis procurée un livre de recettes portugaises et des signets pour partager avec mes amies lectrices ce souvenir impressionnant.

La principale rue marchande de Porto est la Rua de Santa Catarina.  On y trouve énormément d’activités et de belles boutiques comme d’élégants restaurants dont certains sont très célèbres comme le café Majestic.  Enfin une visite s’impose au marché de Bolhao où on peut trouver énormément de produits portugais dont des nappes, des serviettes, et autres produits de coton extraordinaire, qui font la renommée du Portugal.

La visite se poursuit de l’autre côté du fleuve Douro à Gaia.  C’est là que sont logés les chais de porto.  On peut accéder à pied, en bus ou en voiture par le pont Luis 1er qui relie les deux rives du Douro.  Il y a six ponts reliant la vieille ville de Porto à Gaia.  Le plus ancien pont de la ville est le pont ferroviaire Maria Pia avec une arche unique de 350m de haut.  On reconnaît tout à fait la signature de Gustave Eiffel.

De Gaia la vue sur Porto est magnifique. Le centre historique de Porto est d’ailleurs inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1996.  Cela a donné lieu à la restauration de la vieille ville pour le plus grand plaisir des visiteurs que nous sommes.

Même si la cueillette des raisins servant à la production du porto se fait en septembre, ce n’est qu’en avril que les barils sont livrés aux chais de Gaia.  Evidemment la modernité faisant son oeuvre, les barils de chêne servant au transport du vin, ont été remplacées par des citernes afin d’éviter l’oxygénation du vin.  Les barils de vieillissement sont construits directement dans les caves et quand leur vie utile est terminée pour les fins du vin de porto (environ 40 ans), ils sont envoyés en Angleterre pour une deuxième vie afin de recevoir le whisky et le sherry!

On peut encore admirer quelques barques portugaises chargées de barils sur le Douro.  C’est une mise en scène pour nous rappeler les anciennes façons de transporter le précieux liquide.  Ces « rabelos » sont des barques oblongues à fond plat avec une large voile carrée.  Ces rabelos sont les emblèmes de Porto et de son vin.  Evidemment une visite de chais s’impose et Burmester, juste à la sortie du pont, nous a accueillies pour une découverte intéressante.

Bien sûr, chaque vendange est une attente et chaque dégustation une célébration!  Les portos ruby, tawny et vintage sont bien connus alors que le porto blanc est d’appréciation plus récente.  Personnellement j’ai beaucoup aimé le porto blanc avec du « tonic water » et du citron.  C’est un apéritif absolument délicieux que nous avons apprécié le soir même lors de notre visite dans un restaurant près de chez nous!  Quelle chance de pouvoir faire différentes expériences gastronomiques dans les environs de notre maison.

Pour varier un peu les découvertes, nous avons décidé de faire une pause du côté de la vallée du fleuve Douro.

La vallée du Douro

Visiter des régions viticoles est toujours un plaisir.  Quand en plus, on connaît peu le vin de la région, la découverte est d’autant plus agréable.  Le Douro sépare deux côtés d’une superbe vallée.  De chaque côté du fleuve à environ 100 km de Porto, montent des espaliers supportées par des murs de roches remontant dans certains cas jusqu’au Moyen Âge.  Il y a des « Quinta » à savoir des fermes, partout.  Les plus grands noms des maisons de porto sont clairement identifiés.  Malheureusement, il ne reste que deux entreprises productrices de porto de propriété encore portugaise.  Il s’agit de Sandeman et de Ferreira.  Toutes les autres entreprises appartiennent à des étrangers.

La vallée du Douro s’étend jusqu’à la frontière espagnole.  De chaque côté on peut observer les différentes couleurs des vignobles, selon l’orientation du soleil.  C’est un spectacle magnifique.  On sent que notre guide veut que nous aimions son pays.  Grâce à l’administratrice de notre maison de location qui avait établi le contact, notre guide anticipe tous nos désirs!  Notre administratrice nous avait informées que la visite de la Quinta était sans frais, parce que l’entreprise propriétaire de notre location ne retire aucune commission de ses références commerciales préférant laisser ses clients bénéficier de ses avantages.

Nous avons visiter le vignoble de la Quinta Do Seixo, appartenant au groupe Sandeman. La route est belle et notre guide, également chauffeur, est d’une politesse et d’une générosité charmantes.  Il parle un excellent français et conduit une voiture d’entreprise de luxe de manière très confortable.  Il nous fait découvrir les productions de son pays:  marrons, olives, liège et eucalyptus dont on critique le besoin en eau aux dépens des autres espèces.  Cet arbre importé d’Australie parce qu’il pousse très vite, serait devenu une menace pour le pays à cause de l’assèchement des sols où il s’enracine, avec pour conséquence un risque élevé d’incendie.  De plus cet arbre n’a aucun prédateur et nuit aux autres espèces autochtones.  La seule façon de s’en défaire est de le couper en hiver!

Enfin on apprend que le chêne liège pousse dans le sud et dans la vallée du Douro.  Toutefois le liège en provenance du sud est de meilleure qualité que celui du Douro.  Le Portugal est le premier producteur de liège au monde et nous avons pu constater que plusieurs artisans l’utilisent pour des créations originales.  Le liège est un chêne très fragile.  Il faut plus de six ans d’entrainement pour apprendre à bien le cueillir.  De plus, il requiert neuf ans de culture avant la cueillette et si le liège est mal cueilli l’arbre meurt.   Sinon il peut produire durant plus de 200 ans.  Evidemment c’est un produit très résistant à l’eau.

La démarcation du Val du Douro est assurée par 335 bornes de granite.  On peut les voir tout le long de la route.  Partout où nous portons les yeux, c’est un spectacle grandiose et la température est avec nous!  Le sol semble très pauvre.  Dans les faits, les coteaux schisteux reposent sur un sol granitique où rien d’autre ne semble pousser.  C’est le sol schistique qui assure la constance de la température permettant la culture du raisin au fin de production du vin de porto.

Le porto est un vin muté c’est à dire un vin auquel on a ajouté une eau-de-vie de vin pure.  L’initiative d’un marchand anglais (ou écossais) du nom de Jean Beardsley responsable de cet ajout, visait non seulement à permettre le transport du vin, mais également à en améliorer le goût et surtout le degré en alcool.  C’est la recette des portos aujourd’hui encore.  La normalisation de la qualité revient par contre au marquis de Pombal comme je l’ai déjà mentionné.

Le porto est toujours un vin d’assemblage.  Le plus jeune est le Ruby vieilli entre 2 et 6 ans. D’un rouge sombre, oxydé à l’air et il peut se garder longtemps une fois la bouteille débouchée.  Le Tawny est un assemblage de cuvées vieillies entre 5 et 7 ans en fûts au contact de l’air.  On le boit chambré.  Enfin, le Vintage est le produit d’une année exceptionnelle qui reste 2 ans en fût avant d’être embouteillé.  Il vieillit en bouteille où il se bonifie.  Il peut atteindre sa maturité à 20 ans et même au delà.  C’est un vin de très longue garde qui devrait être décanté avant sa consommation et qui ne se conserve pas une fois débouché, subissant une oxydation très rapide.

À la Quinta do Seixo les guides nous accueillent en cape noire des étudiants de Coimbra avec le chapeau espagnol (du genre Zoro) à l’image de l’homme de Sandeman, symbole de l’entreprise qui possède les productions de sherry espagnol et de porto portugais.  La visite est chaleureuse et nous permet de reprendre le fil de l’histoire du vin de porto et de ses particularités.  Le Douro serait la première région vinicole au monde si l’on se fit à notre visite.  Cela serait dû à son climat extrême.  Au fil de la visite, on peut suivre l’évolution du vin depuis la cueillette des raisins jusqu’à la fermentation en passant par le foulage des raisins, se faisant aujourd’hui de manière mécanique évidemment.

En plus du vin de porto, on connaît de plus en plus les vins du sud du Portugal.  Le « vinho verde » a été une heureuse découverte pour moi.  Ce vin constituerait la plus grande exportation du Portugal depuis que les femmes le choisissent à cause de son faible taux en alcool.  Je connaissais le vin vert français mais la découverte du vin vert portugais a été des plus agréable.  C’est un vin jeune surtout produit dans la région du Minho.  On en produit du rouge comme du blanc, mais tous doivent être bus jeunes.  Leur zone de production couvre environ 15% des  superficies viticoles portugaises.  C’est une appellation d’origine contrôlée.  Tous les autres vins du Douro sont tout aussi fascinants.

Ces régions viticoles sont toujours plongées dans le brouillard le matin et le soir.  On longe un autre fleuve tributaire du Douro où plusieurs petits vignobles de famille s’offrent à nous.  On apprend que toutes les propriétés ont des vignes autour de la propriété avec un jardin et une maison au centre.  On traverse aussi un pont à Lamego.  Il fut construit et financé par la municipalité pour recevoir un train qui n’y a jamais circulé parce que le dictateur Salazar a toujours refusé de l’autoriser.

Il y a en fait cinq écluses sur le Douro ce qui fait que les croisières fluviales sur ce fleuve prennent beaucoup de temps.  C’est important à savoir si on veut faire une croisière fluviale sur le Douro.  D’ailleurs nous avons pris un repas du midi à Pinhâo à l’abri d’arbres majestueux sur une terrasse en bordure du fleuve Douro.  Devant nous glissait doucement un bateau de la compagnie Viking, réputée pour ses croisières fluviales ainsi que des petites barques portugaises qui offraient de courtes croisières sur le fleuve.

Sur la route du retour, un petit détour du côté de Sabrosa dans le district de Vila Real, nous permet de voir la maison natale de Fernand de Magellan né en 1480.  La maison appartient toujours à la famille.  Comme Fernand n’était pas le fils ainé, il a dû choisir un métier pour faire sa marque et gagner sa vie.  Il est devenu navigateur et explorateur!  Le célèbre détroit reliant l’océan Atlantique au Pacifique au sud de l’Argentine porte son nom.  Il est mort en Indonésie.

Puis on file vers Vila Real dont le nom rappelle qu’elle était le siège de séjour d’été et de chasse de la royauté.  Anciennement un lieu touristique important, c’est aujourd’hui une ville banlieue de Porto où la chasse aux cerfs est interdite parce que ces derniers sont en voie d’extinction mais dont la chasse aux loups est contrôlée par la police.  Cette ville a été développée par les Dominicains jusqu’à leur expulsion comme toutes les autres communautés religieuses par Pombal en 1840.

Sur la suggestion de notre guide, nous avons fait un arrêt à Amarante à 70 km de Porto.  Cette ville médiévale est charmante.  C’est à Amarante que l’armée de Napoléon a été stoppée.  Un siège de 14 jours aura permis à Porto de se préparer et plus tard de se défendre sans jamais être vaincue.   Sur la place principale on trouve l’église et le monastère de Saint Gonzague  avec un joli pont devant le portail qui nous conduit dans la vieille ville.

À Amarante, nous avons goûté aux célèbres pâtisseries portugaises, faites avec une grande concentration de jaunes d’oeufs et qui seraient à l’origine de la pâtisserie moderne!  Il y en avait tout un échantillon.  Elles sont délicieuses.  Leur forte concentration en jaune d’oeufs est due au fait que les religieuses utilisaient les blancs d’oeufs pour empeser les vêtements religieux avec pour résultat un surplus de jaunes d’oeufs.  C’est l’origine de toutes ces fabuleuses pâtisseries portugaises.  Au Portugal la religion est omniprésente!  Même dans la gastronomie.

Le paysage de cette région m’a beaucoup fait penser à la Corse, bien que les routes y soient beaucoup meilleures!  Le fleuve Douro part de la Catalogne et sur 950 km il file vers le Portugal où il lui faut encore 217km pour atteindre la mer.  Dans cette vallée, les vignes ont également été réintroduites grâce aux américains pour les mêmes raisons qu’ailleurs en Europe, à savoir le célèbre insecte phylloxéra de 1835 qui avait détruit toutes les vignes sur ce continent.

Le Portugal posséderait le plus haut taux d’ensoleillement en Europe et on y retrouve plusieurs producteurs d’énergie solaire dont un parc important en Alentejo.  La compagnie d’électricité  maintenant propriété chinoise rachète cette énergie  pour la distribuer.  Un dicton serait d’ailleurs à la mode ces temps-ci au Portugal:  « On a peut-être la crise mais on a le beau temps ».

Notre guide fait remarquer qu’aujourd’hui les cigognes du Portugal ne quittent plus le pays pour l’hiver.  Cela serait dû au réchauffement climatique.  D’ailleurs il est intéressant de noter qu’à cause de ces oiseaux, les éoliennes ne tournent pas la nuit au Portugal.

Foz Do Douro ou la nouvelle ville

Porto c’est la « costa verde » du Portugal et Foz do Douro en est le plus bel exemple.  Cette partie de la ville se construit dans un contexte de modernité avant gardiste.  Anciennement un village de pêcheurs, un peu plus loin vers le nord sur la mer se trouvait Marosinho.  C’est le quartier où a été construit le nouveau terminal de croisières ainsi qu’un grand centre commercial.  C’est en continuant dans cette partie de la ville sur l’avenue Boa Vista en direction de l’université que l’on retrouve le magnifique Musée d’Art contemporain.  Ce musée assez récent loge au sein d’une forêt appelée Serralves, du nom d’une fondation du même nom.  Les maisons des alentours rivalisent de modernité et le jour de notre visite il y avait fête d’automne dans le parc.

Plus loin on peut continuer et aussi visiter la maison de la musique.  L’architecture moderne de la « casa da musica »  est désarmante parce que cette dernière se trouve à la jonction de la ville moderne et tout près d’une partie de la ville ancienne.  Tout de marbre, d’aluminium et de détails architecturaux surprenants, cet édifice tout en cubes est impressionnant.

À la fin de notre séjour, une soirée de fado s’imposait et sur le conseil de notre administratrice, c’est le restaurant Guanary qui nous a permis de profiter d’un concert bien attendu.  Le fado est apparemment plus gai ou plutôt moins triste à Porto qu’à Lisbonne.  Dans ce restaurant de l’Avenida dos Aliados nous pouvons en profiter à compter de 21:30 heures pour le prix des consommations.  C’est une belle expérience et la  chanteuse accompagnée de deux musiciens nous a offert quelques prestations fort agréables.  Il semble qu’ailleurs qu’il faille payer un cachet fixe pour écouter du fado.  Cela est le cas à Porto comme à Lisbonne.

Ce restaurant a la particularité de rappeler l’influence brésilienne avec des dessins de la tribu autochtones des « Guanary » du Brésil.  L’atmosphère du restaurant est à la fête et les touristes comme les locaux s’y retrouvent pour partager ce plaisir musical.

C’est important de mentionner ici que nos déplacements se sont faits en bus durant tout notre séjour à Porto.  D’ailleurs les transports en commun sont très efficaces au Portugal et il est facile de s’y retrouver avec un minimum d’efforts.  En effet, des tableaux d’horaires et de circuits se trouvent presqu’à tous les arrêts et « abribus ».  En cas de doute les portugais sont très ouverts pour répondre à nos interrogations!  Les déplacements sont donc très économiques.

L’expérience du marché aux oiseaux du dimanche matin sur la place du Musée de la photographie est aussi intéressante.  Ce musée occupe une ancienne prison dont la restauration a été faite par le même architecte de la maison que nous occupons!  On y retrouve différentes expositions.  Un étage offrent des présentoirs d’appareils photos ayant servi à l’espionnage durant les années de la guerre froide.  C’est vraiment étonnant, d’autant qu’aujourd’hui la miniaturisation est telle que ces échantillons nous semblent bien naïfs!  Sur la place on peut voir une magnifique sculpture qui m’a beaucoup émue par ce qu’elle évoque.

Ce pays est le pays du poisson et surtout de la morue dite « bacalhau » sous toutes ses formes.   Nous y avons fait des découvertes tous les jours.  D’ailleurs tous les matins très tôt les pêcheurs vendent leurs prises au marché aux poissons à quelques coins de rue de chez nous.  Les restaurants offrent des plats selon l’arrivage.  Si les pêcheurs ne sortent pas une journée, alors les menus changent pour la journée.  Ainsi chaque fois que l’on prend du poisson, il est toujours frais.  C’est merveilleux et la cuisine portugaise est vraiment délicieuse.

Le séjour dans ce pays a été non seulement une belle découverte.  Il a été aussi l’occasion de mieux comprendre la complexité de ce pays et de sa langue.  La découverte de l’histoire du Portugal m’a permis de comprendre pourquoi la langue portugaise est si difficile.  Cela a permis également d’apprécier pourquoi le français est apprécié des portugais qui y ont des liens historiques bien que lointains.  Enfin, sur le plan architectural ce pays offre une très grande variété et une très grande richesse que les guerres n’ont pas détruit.  On a l’impression souvent de vivre au 18e siècle et même avant…. mais dans la modernité du XXIe siècle.

Merci à mes amis Portugais de m’avoir donné l’occasion de découvrir un pays riche en histoire et en talent!

Sources:  Divers guides de voyage, en particulier, Portugal mode d’emploi, Gallimard, et Portugal Geoguide, Gallimard

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