15 février 2008

Lettre de M. Denis Gaumond, citoyen de Rosemont, adressée à la Ministre Christine St-Pierre

"Vous trouverez ci-joint une lettre de Monsieur Denis Gaumond, citoyen de Rosemont adressée à la ministre de la Culture, des communications et de la Condition féminine, Madame Christine St-Pierre. Monsieur Gaumond m'a tranmis cette lettre et m'a donnée l'autorisation de la publier. " - Rita Dionne-Marsolais, députée de Rosemont

"Vous trouverez ci-joint une lettre de Monsieur Denis Gaumond, citoyen de Rosemont adressée à la ministre de la Culture, des communications et de la Condition féminine, Madame Christine St-Pierre.  Monsieur Gaumond m’a tranmis cette lettre et m’a donnée l’autorisation de la publier. " – Rita Dionne-Marsolais, députée de Rosemont

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Lettre à Madame la ministre Christine St-Pierre

Bonjour Madame la Ministre,

D’abord, laissez-moi vous exprimer ma compréhension et mon support devant cette mini crise linguistique que vous traversez. M. Charest a bien raison de dire que ce n’est pas une vraie crise. Il ne faut quand même pas exagérer. Même si plusieurs s’acharnent sur vous. Je ne trouve pas cela très drôle. On a beau être ministre, on ne peut être responsable de tout. Mais, vous connaissez les journalistes. Quand ils tiennent une proie…

Pour ma part je vous écris afin d’être éclairé sur au moins un élément de cette situation. Je suis assez mal à l’aise avec l’accusation disant que les francophones n’ont pas assez fait d’enfants pour expliquer que l’île de Montréal, certaines poches de ses banlieues et des zones frontalières du Québec sont maintenant majoritairement non françaises. Pourtant, chiffre à l’appui, je constate que le taux de fécondité des Québécoises est comparable à celui des Scandinaves, des Brésiliennes, des Australiennes, des Algériennes, des Chinoises et de bien d’autres encore. Même des Françaises malgré un léger changement depuis quelques mois chez elles. Récemment, notre taux était supérieur à celui que l’on trouve en Suisse, Allemagne, Autriche, Grèce, Italie, Japon, Espagne, etc. Même au Canada nos mères québécoises font bonne figure, car en 2006-2007, leur taux de fécondité était supérieur à la moyenne canadienne y compris celui de l’Ontario entre autres. Voici ce qu’en dit « Statistiques Canada ».

Naissances et taux de natalité,
par province et territoire

 

 

Naissances et taux de natalité,
par province sans les territoires

 

(Taux de natalité, Statistiques Canada)

 

 

(Sans les territoires)

 

 

 

2006-2007

 

 

 

 

2006-2007

 

Canada

 

10,8

 

 

Canada

 

10,5

 

 

 

 

 

 

Nunavut

 

24,1

 

 

Alberta

 

13,3

 

Territoires du Nord-Ouest

 

16,0

 

 

Saskatchewan

 

12,1

 

Alberta

 

13,3

 

 

Manitoba

 

12,0

 

Saskatchewan

 

12,1

 

 

Québec

 

10,9

 

Manitoba

 

12,0

 

 

Ontario

 

10,6

 

Québec

 

10,9

 

 

Île-du-Prince-Édouard

 

9,8

 

Ontario

 

10,6

 

 

Colombie-Britannique

 

9,8

 

Territoire du Yukon

 

10,0

 

 

Nouvelle-Écosse

 

9,0

 

Île-du-Prince-Édouard

 

9,8

 

 

Nouveau-Brunswick

 

9,0

 

Colombie-Britannique

 

9,8

 

 

Terre-Neuve-et-Labrador

 

8,5

 

Nouvelle-Écosse

 

9,0

 

 

 

 

Nouveau-Brunswick

 

9,0

 

 

 

 

Terre-Neuve-et-Labrador

 

8,5

 

 

 

 

 

 

 

Aussi, si Montréal est maintenant majoritairement moins française à cause du bas taux de fécondité des Québécoises, je me demande comment est la situation dans les pays comparables ou encore dans ceux au taux de fécondité encore plus bas. J’imagine qu’Oslo, Stockholm, Helsinki et Copenhague en Scandinavie ont majoritairement perdu leur langue d’origine. Tout comme Montréal. De même pour les Brésiliens de Rio, Sao Paolo, Brasília et autres. Je n’ai pas eu de nouvelles de l’Australie.  Ni d’Alger. Ça viendra sans doute. Parfois les nouvelles sont si longues à venir. Certains politiciens cachent des choses aux électeurs pour des raisons que je trouve bien obscures. Surtout sur des sujets aussi sensibles que la langue. À Pékin, cela aiderait pour les Jeux olympiques de cet été. Surtout si la langue de remplacement est l’anglais comme ici à Montréal.

En Allemagne, Autriche, Espagne, Grèce, Italie, Japon et Suisse où le taux de fécondité ou de natalité est plus bas qu’ici, ils doivent frôler la catastrophe j’imagine. Mais je n’ai pas eu de nouvelle à cet égard non plus. Pourtant, j’arrive d’Espagne et je ne me suis aperçu de rien. Mes amis grecs ne m’ont rien dit non plus. Je suis très embêté. Peut-être pouvez-vous m’éclairer?

En ce qui concerne le Canada, Toronto et Kingston, en Ontario, ont-elles basculé anglophones minoritaires comme Montréal est devenue minoritairement francophone? Au profit de quelle langue? Pas la française toujours? Arrêtez là. Ça serait trop… Et Charlottetown, Halifax, St John’s, Moncton? Le maire Jones doit se retourner dans sa tombe! Puis Victoria? Et Vancouver? Sans doute est-elle passée au mandarin. Ça, c’était prévisible quand même.

Ma mère a eu 14 enfants. Comme bien d’autres. C’était la revanche des berceaux. Elles accouchaient comme des truies, écrivait Mordecai Richler. Fort respectueusement sans doute. Cela ne faisait pas l’affaire. Aujourd’hui on attaque de toute part les babyboumeurs que nous sommes devenus et chaque illuminé essaie de créer un conflit de générations. Puis, maintenant, on reproche aux jeunes mères de ne pas faire assez d’enfant. Avouez, madame la ministre, que ce n’est pas simple! Les femmes, surtout les mères, me semblent responsables de bien des choses sur cette terre des Hommes!

Ce qui est vrai pour Montréal devrait être vrai pour les autres villes concernées. Mais on constate que non dans le fond. Aucune des villes mentionnées plus haut ont perdu leur langue d’origine comme Montréal le fait. Des fois je me dis, madame la ministre, que cette raison évoquée n’est pas la bonne. Quelqu’un abuse-t-il de ma naïveté? Qu’en pensez-vous?

Merci bien de me revenir là-dessus. J’ai pleinement confiance en vous pour clarifier cette situation. Elle m’inquiète de plus en plus. D’autant que récemment, les journaux publiaient une étude, celle-là n’a pas été bloquée, qui disait que le français est en baisse partout au Canada, même au Québec. Avouez que ce n’est pas drôle. Je me demande bien quel accommodement raisonnable il me faudra encore faire. Et surtout dans quelle langue! Aidez-moi, il faut que je me prépare. Vous savez, votre gouvernement désire faire venir plus d’un million de nouveaux immigrants d’ici 20 ans. Ils feront sans doute des enfants en cours de route et prendront une place encore plus importante à Montréal. On sait qu’ils refusent de se rendre en régions où les besoins sont si importants nous dit-on. Pendant ce temps, plus d’un million de baby-boomers français comme moi auront disparu dans la mort.  Des fois je me demande si on n’a pas fait ce Québec pour le livrer comme cela aux nouveaux venus sans aucune précaution linguistique, histoire d’être accommodant. Comme ils sont canadiens, et que le Canada encourage leur anglicisation, je me demande bien ce qui arrivera à ce qui restera de français dans notre belle province. Je ne sais vraiment pas comment nos enfants « de souche » vont prendre cela. Maybe it’s gonna be ok for them. Ils semblent mieux s’accommoder de l’anglais que les baby-boomers comme moi. Enfin, expliquez-moi donc tout cela. Madame Yolande James, la ministre de l’Immigration, peut sans doute vous aider. Elle comprend certainement très bien ce dossier. Elle en est responsable et me semble bien bonne et sûre d’elle-même.

Merci beaucoup de défendre nos intérêts. Surtout, surtout, madame la ministre, ne vous laissez pas faire par les journalistes provocateurs. Moi je dis qu’ils sont jaloux de ce que vous êtes devenue.

Denis Gaumond
Habitant de Montréal

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